Mangas & Animes

Bugs Bunny était un samouraï

Article écrit par Shmo dans le cadre de la semaine thaliste.

Oulàh. Écrire sur Néant Vert, ça me fait tout bizarre. C’est comme si on me disait « Tiens petit, voilà ma Mercedes, ma maison, mon jacuzzi, ma femme et mes enfants, va faire un petit tour avec. »

Je pense que vous connaissez tous les Tortues Ninjas (et j’espère, sinon mon introduction commence mal), cette série a connu plusieurs adaptations en dessin animés et quelques jeux vidéos et parfois, dans ces Bds ou dessin animés, il y avait un lapin. Un lapin en tenue de samouraï qui répondait au nom de Usagi. Il est possible que vous n’avez pas fait attention à ce personnage qui apparaît de manière très rapide, épisodiquement et qui sert juste de sidekick de fortune.

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Sauf qu’en réalité, c’était pas un sidekick mis à l’arrache par Kevin Eastman et Peter Laird mais un caméo d’un personnage d’une autre série. J’ai nommé Usagi Yojimbo (Usagi Garde du corps, à noter que Usagi signifie Lapin pour ceux qui ne sauraient pas) et qui est l’un des meilleurs comics au monde (remarque, j’en ai lu que 2, celui-ci et Superman Red Son donc bon). Usagi Yojimbo c’est un comic, pas très connu, réalisé par Stan Sakaï (un japonais naturalisé américain) qui raconte les aventures d’Usagi, un rônin (samourai sans maître), et de ses alliés qu’il rencontrera en cours de route. Le tout se déroulant au Japon Féodal au 17ème siècle.

C’est une série que j’ai découvert en 2003 à l’occasion du Salon du Livre, son format atypique (A4), sa couverture qui me hurlait « Prends-moi, y a des samouraï dedans et même des lapins, allez prends-moi comme tu prendrais un Dragon Ball, t’aimes ça ma salope. » (j’avais 10 ans, je lisais Dragon Ball, foutez-moi la paix) ont fait que je l’ai pris et le tome 2 avec parce que ça devait coûter pas très cher. J’ai pas regretté de les avoir achetés à vrai dire vu que peu de temps après, j’ai acheté le tome 3 et attendu près d’un an pour le tome 4. Maintenant j’en suis au tome 17 et même si j’ai du retard (le tome 19 est sorti, je crois), j’adhère toujours autant à ce comic. Son histoire, ses personnages, son graphisme, son ambiance. Tout qui me hurle « Aime-moi ». Si vous aimez les histoires de samouraï/japon féodal, je ne peux que vous recommander Usagi. Le fait qu’il s’agisse d’un comic (donc américain) plutôt qu’un manga lui donne un caractère particulier car même si le thème est purement japonais, la construction de l’oeuvre est celle d’une bd américaine. Ça sort des habitudes et des clichés qu’on se tape dans les mangas et ça fait du bien. Vraiment. On découvre de nouvelles facettes du thème et une approche inédite.

Le concept que tous les personnages soient des animaux n’est pas sans rappeler le Chôjû-jinbutsu-giga, un emaki (ancêtre du manga en quelques sortes) ou des animaux s’amusaient et batifolaient comme s’il s’agissait d’humains. Là, on a uniquement des animaux anthropomorphique à la Mickey/Bugs Bunny qui vivent à la place des humains (même si on a des parfois des questions existentiel d’ordre « Pourquoi le lapin est humain mais le cheval reste cheval? »). Si cet aspect animal peut rebuter les gens (« Hiii, genre j’vais lire des animaux à la con? C’est pour les pédés, gnnih »), ben.. ce serait con de s’arrêter à ce stade même si je conçois que c’est pas aussi glamour que voir Kaoru ou Yuya Shiina. Ca reste toutefois assez agréable (voir mieux, on a pas de fan service boursouflé qui ne sert à rien) et ça rends la BD accessible à tout le monde.

Le style de dessin est assez soigné, j’aime beaucoup mais je peux comprendre que ce ne soit pas au goût de chacun. Son style a toutefois bien évolué entre le premier tome et actuellement. Le début est assez dur à relire après coup, les animaux ressemblaient plus à de réel animaux (Usagi a une tronche de lapin), les personnages étaient moins expressifs en général puis, petit à petit, c’est devenu assez cartoon, un trait qu’on pourrait qualifier de très américain mais sans tomber dans les classiques Warner/Disney (il a pas une tronche de Bugs quoi), ça garde aussi un esprit japonais quelque part avec tous ces kimonos, ces décors typiquement nippons. L’histoire baigne à moitié dans le folklore japonais puisqu’on verra souvent des fantômes et autres esprits japonais. On aura également un passage au sujet de « Kusanagi » (la facheuse d’âme) qui est une épée mythique des dieux et des personnages un peu tarés se prenant pour les messagers des Dieux. Sans être totalement dans le fantastique (ces évènements sont anecdotiques) mais sans être totalement réaliste, on a un équilibre un peu bizarre qui marche cependant plutôt bien. Les expressions sont bien réalisé et le découpage de l’action est bien branlé. À aucun moment on ne se dit « Il vient de faire quoi là? » ou qu’on ait besoin de s’arrêter pour comprendre l’action au moment présent. Sur ce point-là, on peut dire que le dessin est réussi. Même si les combats sont le centre de l’action, ils ne sont jamais très long et restent plutôt plausible dans leur majorité (même si parfois on a du wtf avec des flèches arrêté à la main en plein vol mais bon). Dernièrement, le fait que ce soie des animaux permet également de faire moults personnages sans qu’ils se ressemblent vu que ce sera pas forcément la même bestiole. Difficile donc de confondre (sauf peut-être les chats qui ont un peu tous la même gueule) qui est qui.

Outre l’aspect graphique, ce qui me plaît le plus, c’est bien évidemment le scénario. Un scénario plutôt prenant avec énormément de retournement de situation et de renouvellement. Si certains chapitres sentent le réchauffé, il y a toujours des petits détails qui vous pousseront à lire la suite, on ne se lasse pas vraiment puisque le comic est également bien garni en action ou en suspense sur certaines situations. Si le début paraît simpliste et parfois facile, à partir du tome 4, on tombe vraiment sur une intrigue passionnante et auquel on a envie de savoir la suite. Vraiment. J’ai pas encore vu de essoufflement de la série (même si ça arrivera bien un jour) et c’est plutôt yay. Pour le scénario en soi, en résumé on a ça:

Miyamoto Usagi est un jeune lapin samouraï au service du Seigneur Mifune. Fidèle au Bushido (la voie du samouraï) et à son maître. Tout bascule lorsque, durant la bataille d’Adachigara, son maître meurt à cause d’un traître dans ses rangs et qu’il devient rônin. C’est ce qui est expliqué dès les 3 premières pages de la BD. N’ayant plus personne à qui servir, Usagi voyage à travers tout le Japon en s’arrêtant dans des auberges, en rencontrant toute sorte de gens et en y amenant la justice dès qu’il y a un problème sous ses pieds. Et il y a souvent un problème sous ses pieds. Soit y a des problèmes dans tout le pays, soit Usagi a vraiment pas de bol. Sans oublier qu’il a le don pour se fourrer dans toutes les situations les plus improbables et qui ne le concernent pas.

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Le tome 1 commence un an après cette bataille où il retournera sur les lieux et qu’il croisera une vieille femme et le traître de la bataille. C’est à partir de ce point là qu’on va suivre la route d’Usagi à travers tout le Japon ancien. Si le tome 2 est un flash-back qui explique la jeunesse d’Usagi, le reste sera plus ou moins continu même si de nombreux flash-backs viendront ponctuer l’histoire pour raconter le passé des personnages importants (ou non, parfois, un simple figurant aura tout un scénario). Les trois premiers tomes seront une introduction à l’univers d’Usagi présentant quelques personnages et plaçant un peu dans quel contexte se trouve le Japon (avec un peu de teasing sur les « méchants » globaux), on en apprends également sur les clans. Le quatrième tome est une aventure entière qui narre l’empêchement d’une rébellion contre le shôgun et on revoit des tas de visages connus durant les 3 premiers tomes. C’est à partir de ce moment que le scénario « démarre » vraiment, puisque cette rébellion déclenchera tout un processus logique qui changera beaucoup de choses.

Le scénario d’Usagi fonctionne ainsi. On a des petits chapitres qui semblent indépendant les uns des autres et au bout d’un moment, un chapitre fait référence à un autre et, entre des chapitres pseudo-indépendants, il y a une intrigue qui se met en place, comme un échiquier, entre deux mouvement de pions à priori inutiles, il y a un fou qui se déplace pour préparer un plan vicieux. Tous les éléments iront se mettre en place petit à petit, avec des introductions de nouveaux personnages, de visages qui se répètent, des nouveaux évènements jusqu’à que cela atteigne un climax et qu’un tome est entièrement consacré à la résolution de l’intrigue, souvent dans des moments bien forts, puis ça semble se résoudre, ça se calme, on se remet de nos émotions et ça recommence, en prenant à chaque fois un peu d’ampleur et en devenant de plus en plus épique à chaque fois puisqu’on a toujours le background derrière qui nous revient.

Je peux d’ailleurs me permettre de faire une comparaison avec Phoenix Wright dans cette construction, la dernière affaire du premier opus est très bien (4ème enquête, pas la 5ème DS-Bonus) mais la dernière affaire du troisième opus est dix mille fois mieux car tous les personnages qu’on a côtoyé en trois jeux réapparaissent, tout se met en place comme dans un puzzle et on a toujours le background derrière qui nous revient et qui accentue le climax de l’affaire. Pour Usagi Yojimbo, c’est exactement ça. De surcroît, ça dépasse les trois opus. :jospin: Sans oublier que si les intrigues sont assez colossales comme ça, elles servent toutes à un scénario commun qui se dévoile petit à petit et qui promet énormément. On peut dire que si les chapitres préparent des climax, ces mêmes climax servent petit à petit à un Super-Climax qui servent eux-même à un Hyper Galaxy Super-Climax! Etc.

C’est ce qui fait à la fois la force et la faiblesse du comic car il faut vraiment s’accrocher après coup pour comprendre l’histoire. Si au début, ça va, vers les tomes 14-15, il y a régulièrement des visages qui reviennent en disant « Yo, ça fait longtemps! »et un petit Cf. t.10. Si on lit les comics dans un intervalle pas trop long, ça va, mais quand six mois ont passé entre deux tomes, je peux vous assurer que se taper les 14 autres comics juste pour se rappeler des personnages et de ce qu’ils ont fait, ça peut lasser. Même si, oh, je serai pas trop triste si on me forçait à les relire. Cela veut également dire que si on veut comprendre l’histoire, mieux vaut commencer par le tome 1 et que y commencer au milieu, c’est pas vraiment conseillé.

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En dehors du scénario, c’est bien évidemment les personnages qui me font craquer. Sans partir d’une base fondamentalement originale, ces personnes évoluent au fil de l’aventure et deviennent de plus en plus complexes. Du moins, pour les personnages importants, les méchants qui n’apparaissent qu’un seul épisode restent con tout le long mais c’est pas très grave vu qu’on les reverra plus. Ces personnages ne seront pas toujours du côté d’Usagi et parfois seulement car ils ont un but commun, c’est le cas du clan ninja Neko par exemple ou du Chien errant. Tous ces personnages viendront et reviendront à plusieurs moments de l’histoire pour des buts bien planifiés ou juste pour devenir un peu plus potes et se barrer. Au final, on a tout un plan de relations entre chaque personnages qui n’a rien à envier des tableaux de liaisons de Plus belle la vie.

Certains personnages apparaîtront plus que d’autres, certains n’apparaîtront probablement plus, ayant fait ce qu’ils fallait, d’autre apparaissent sans qu’on sache pourquoi, révélant leur utilité dans un futur probablement proche. À noter qu’on aura parfois des chapitres bonus mettant en scène les tortues ninjas. Comme les deux sont potes, y a pas que raison pour que seul Usagi vienne se taper l’incruste chez eux. Même si ces chapitres servent à rien et que je n’aime pas particulièrement les tortues ninjas, c’est assez trippant de les voir.

Le comic en est au tome 19, n’ayant pas vraiment compris le système de publication américaine, je crois qu’on en Juillet 2008, on en était au tome 22, à raison d’1 album par an (presque, parfois 2) on doit en être au tome 24-26 à tout casser. Je sais pas si un tome américain = un tome français mais bon, sans oublier que certaines compilations ne mettent pas forcément tous les chapitres dans le même ordre. Ca devient bordélique. Et bien que cela aie débuté en 1987, ça continue toujours et c’est apparemment loin d’être fini. Espérons-le.

La traduction est plutôt bonne même si c’est un peu étrange dans la mesure où la langue d’origine n’est pas le japonais mais l’anglais (même si ils sont supposés parler japonais dans le comic), alors quand un personnage se tire en disant « Abayô! » avec une annotation en bas de page pour nous expliquer que Abayô signifie À bientôt. C’est probablement Stan Sakaï lui-même qui a du mettre ceci en japonais… Dans quel but? Autant pour la nouriture je veux bien qu’il mettes les noms en japonais, dire alcool de riz à chaque fois qu’ils demandent du saké, ça devient lourdingue, pour les titres honorifiques de statut/noblesse… pourquoi pas (du genre Chûnin, Jûnnin, Kunoichi, tiens je cite que des trucs de ninjas) puisque Shôgun et Samouraï sont déjà en japonais et sont déjà des titres. Ca me dérange pas non plus pour les armes tiens mais pour des A bientôt! Grand-mère! Mari! On est pas obligé d’avoir un Abayô, Obasan et Ojii! Ca sert à rien hormis avoir une petite annotation à côté qui nous pourrit la lecture.Ca reste anecdotique et ça me dégoute pas totalement de la lecture (heureusement qu’ils foutent les traductions quand même) mais ça me perturbe. Vraiment.

Toujours est-il que Usagi est un des meilleurs comics que j’ai lu à ce jour et qu’il enfonce bien violent une bonne plâtrée de mangas sur ce thème (alors qu’ils jouent dans leur propre terrain! Ca craint!). Une bonne histoire, de bons personnages, un bon dessin. Je reprocherai juste une hausse de prix un peu chiant au fil des années. Si le tome 9 m’a coûté 6,40 francs suisses en 2006, il coûte maintenant 9,45 francs suisses en 2010. Chiant! Je regrette aussi l’abandon de l’ancien format d’Usagi. Quand j’ai acheté les 3 premiers tomes, c’était de grands formats A4, à partir du tome 5, ils ont abandonné ce format (peu de vente? Trop cher à produire?) pour un format manga basique standard. Ca me pourrit ma collection dans mon étagère (« Hii, pourquoi t’as commencé au tome 5? ») et c’était assez sympa mais bon. Tant pis. À noter qu’il a eu un jeu vidéo adapté nommé Samurai Warrior: The Battles of Usagi Yojimbo et un jeu de rôle mais j’en sais pas plus.

Voilà, je vais m’arrêter là. J’espère vous avoir donné envie de lire Usagi Yojimbo ou ne serait-ce que de le feuilleter à l’occasion et si vous aimez et bien tant mieux! Si vous trouvez que ça pue la merde par contre ben, rataflüp.

C’était Zyvilin Shmo, qui fait sa promo de pute en promouvant son blog disponible ici. Viendez un coup. Ca me fera PLAIZIR.

Bon, maintenant ça me fait tout bizarre, c’est comme si on me disait « Bon petit, t’as fait un tour, maintenant faut rendre les clés de la Mercedes et tu retournes dans ta Peugeot 102. Non mais oh! En plus, t’as sali le siège. Crétin! »

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3 commentaires

  • Zazen Rouge

    Un article qui fait référence aux emaki du Kôzan-ji ~<3 Je n’ai lu que les premiers tomes d’Usagi Yojimbo mais je confirme: c’est très sympa. Pour ce qui est des annotations en japonais, je trouve cela plutôt intéressant à partir du moment où elles sont justes. Ça peut aider un lecteur à se familiariser avec une langue.

    Sinon merci d’avoir attiré mon attention sur le fait que Kaoru et Yuya portent leur kimono en mode « décolleté pigeonnant ». C’est le mal.

  • frédéric

    Certes le scénario n’est pas des plus recherchés (souvent un coup de saké, un coup de sabre) mais il ne faut pas avoir une « microvue » sur ce « manga » mais une « macrovision » pour découvrir toute la saga qui est enchanteresse
    j’adore 😉

    chaleureusement

    frédéric

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