Les fous du volant
Le pitch: « Ayano Hanesaki, élève de première année au lycée Kitakomachi, est une jeune fille au caractère assez peu affirmée, qui va se retrouver à devoir suivre sa meilleure amie, Erina, au sein du club de badminton du lycée. Réticente au départ, Ayano va rapidement montrer que le badminton c’est un sport qu’elle connaît en réalité excellemment bien. Mais ce talent, ce ne sera pas une surprise pour tout le monde: Nagisa, capitaine du club, est ainsi traumatisée par une défaite cinglante qu’elle a eu à l’époque du collège, défaite qui avait été infligée par… Ayano elle-même. «
- Studio: LIDENFILMS
- Réalisation: Ezaki Shinpei
- Date de début de diffusion: 2 Juillet 2018
- Nombre d’épisodes: 13
- Disponible en France: Crunchyroll
On assiste ces dernières années à un retour en force des animes mettant en scène des sports féminins, dans une vague que le média n’avait pas connu depuis l’âge d’or des shojos de sport durant les années 80. Un retour qui n’est pas pour déplaire et dont Hanebado est l’un des fers de lance, se basant pour l’occasion sur un manga de Hamada Kousuke. Et étant être clair tout de suite: du manga, l’anime prend totale liberté dès le premier épisode. Un choix qui déconcertera plus d’un lecteur, qui va voir disparaître pas mal de l’aspect grotesque et humoristique de certains des premiers chapitres.
Car Hanebado joue un pari risqué: en nous introduisant dès le premier épisode à deux personnages principaux profondément antipathiques, le risque de larguer tout spectateur cherchant simplement un divertissement sportif à la cool est très large. Ayano passe ainsi la majorité du récit à alterner entre jeune fille muette manipulée par tout le monde et démone du terrain prête à quelques tacles verbaux vicieux, quand Nagisa passe toute la première moitié du récit à être odieuse avec tous ceux qui l’entourent. Nos deux héroïnes, les valeurs du sport, elles l’ont enfouies très loin et ne voient plus dans le badminton qu’une sorte de corvée, qu’elles se sentent obligées de faire car le sport… c’est leur seule qualité.
Tout le propos de la série va donc être, justement, de voir Nagisa et Ayano devenir de meilleurs sportives… en réapprenant à être de meilleures êtres humaines, ce qui va les imposer de passer à autre chose: Nagisa va devoir « oublier » sa défaite humiliante tandis que Ayano va devoir parvenir à sortir de l’ombre de sa mère, joueuse professionnelle multi-titrée et matriarche de qualité discutable. Quant à leur rivalité exacerbée, elle va trouver une conclusion lors d’un match impitoyable, dont l’intensité n’aura d’égal que sa beauté.
Mais alors, du coup, parlons-en des matchs: Hanebado propose des affrontements sur court d’une qualité ahurissante. La mise en scène y est dynamique, mobile, n’hésite pas à tourner, à bouger, à emphaser la puissance des coups. Vous pensiez que le badminton était un sport élégant, un tennis avec un projectile lent ? Que nenni, dans Hanebado ça s’envoie des patates en permanence et c’est tout leur corps qui en est marqué: le travail de détail sur les muscles est impressionnant, et offre à chaque échange une intensité et une puissance sans égal.
Des matchs, il y’en a cinq ou six étalés sur les treize épisodes de la série et chacun fait preuve de ce soin. Mais entre chaque match, que se passe t-il alors ? Développement des personnages, phrases assassines entre deux entraînement et tentatives parfois légères de s’intéresser au reste des membres du club.. Si il est évidemment bienvenu d’en apprendre plus sur ces personnages, ceux-ci restent au final simples spectateurs de l’histoire des deux héroïnes, histoire dans laquelle ils ne jouent qu’un rôle finalement mineur. Peut-être la seule vraie grande erreur de Hanebado qui, quand il ne parle ni de Nagisa ni de Ayano, peine à être passionnant.
Pour conclure sur le traitement de Nagisa et Ayano, j’applaudis également pas mal le choix de ne jamais vraiment expliciter certaines choses, de faire confiance à son spectateur et de lui laisser mener ses propres conclusions. La mère de Ayano, par exemple, est clairement une mauvaise personne, mais durant toute la série, Ayano n’aura jamais sa « vengeance », ce qui pourrait en décevoir plus d’un. Mais en choisissant de faire de la revanche de Ayano le choix de passer à autre chose, Hanebado offre un message plus fort que si il s’était agi, par exemple, d’humilier cette antagoniste pourtant évidente.
Car au final il est là le paradoxe volontaire de Hanebado: c’est une série qui montre le sport et ses protagonistes sportifs très souvent sous un angle peu reluisants, avec des personnages qui sont toujours à première vue pétris d’égo et ne vivant que dans l’humiliation. Sauf que ce n’est qu’une première impression: plus on avance, plus on constate que tout ce qu’il manque à ces personnages pour revenir sur les rails c’est reprendre conscience que la pratique d’un sport doit intégrer une notion de plaisir, et avec elle la notion de respecter sa discipline et ses compères sportifs. Il serait facile de réduire Hanebado à « la série où le sport c’est extrêmement sérieux » mais la morale est, justement, toute inverse.
Hanebado!
(4 / 5)
Excellent
Radical dans pas mal de ses choix d’adaptation et dans la manière de dépeindre ses personnages, Hanebado prend pas mal de risques… qui paient. La série parvient en treize épisodes à raconter intensément le destin de deux joueuses perdues qui retrouvent pied, et apprennent à faire fi de leur passé, tout en redécouvrant le plaisir du sport. C’est brut, efficace, les matchs sont somptueux: clairement l’un des meilleurs animes de sport qui soit arrivé récemment, et dieu sait que la concurrence est large.
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