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La belle (et triste) histoire de Kemono Friends

Nouvelle vidéo, et nouvel article lié ! Comme j’avais pu le faire avec ufotable ou avec Madoka Magica, angle un peu plus historique aujourd’hui avec l’envie de raconter l’histoire de Kemono Friends. Comme d’habitude, je me suis lancé sur le projet en me disant que ça allait être une petite vidéo, simple à faire, et au final ça a ptet été le montage le plus long et le plus chronophage que j’ai pu vivre depuis ptet ma vidéo sur ufotable. Un peu éreinté, au point où je me suis rendu compte après l’encodage que mon micro sature sur certaines phrases mais plus le temps et l’énergie de réenregistrer :'(.

En attendant, je reste content de cette vidéo qui va donc, en vingt minutes, raconte l’histoire autour de la première saison, revenir sur la controverse autour de la seconde et, de manière un peu légère, dire qu’est-ce que Kemono Friends signifie au sein de l’industrie de l’animation japonaise. Qu’est-ce que ce petit animé en 3D tout moche peut nous apprendre, et quelles ont été les raisons légitimes de son succès ?

Donc voilà, bon visionnage et/ou bonne lecture à vous !

Retranscription de la vidéo –

Le succès, dans l’animation japonaise, il peut prendre plusieurs formes. Parfois c’est une adaptation réussie de manga à succès, parfois c’est une série qui va faire preuve d’une grande qualité de production, parfois c’est une série bien mise en avant de part son marketing, parfois c’est les trois à la fois… et puis parfois c’est une série au budget ultra riquiqui, avec une 3D très sommaire, dix membres de staff grand maximum et des roues qui doivent attendre neuf épisodes avant d’être enfin animées dans l’opening. Oui là je parle de Kemono Friends ! Succès ultra-surprise de l’année 2017, qui a vendu plus d’une centaine de milliers de BluRay au Japon, a déchaîné les discussions sur les réseaux sociaux du pays et même aidé des zoos à rester en vie… malgré un style visuel très fauché et une absence totale de marketing. Un projet déterminé à être diffusé pour mourir, sur lequel les producteurs ne misaient pas un kopeck, mais qui grâce à la détermination de son réalisateur a su trouver son public et s’imposer comme une série marquante de son époque… avant d’être sabotée par sa boîte de production et d’exploser en plein vol à peine quelques mois après le miracle.

Mes amis, préparez donc vos tickets, je vous souhaite la bienvenue à Japari Park, et je vais donc va raconter la chute, la gloire et la rechute d’une franchise unique dans l’histoire des animés… l’histoire de Kemono Friends !

Serval, ready pour le show

Kemono Friends, avant l’anime

Crée par Mine Yoshizaki, mangaka et chara-designer qu’on connaît surtout en France pour la série Keroro, Kemono Friends met en scène un monde habité par des versions humanisées et féminisées… d’animaux – elle par exemple c’est le Serval, elle c’est le Jaguar, elle c’est le loup gris ou bien elle c’est le… euh… Tsuchinoko… c’est un animal légendaire japonais, ne cherchez pas à en trouver un dans un zoo vous risquez d’être un peu déçu. Bref, ces versions humanisées d’animaux elles ont un nom c’est les Friends, mélange rigolo entre deux mots anglais: Friend, bon ça ok logique, mais aussi Fur, la fourrure. Du coup prononcé à la japonaise c’est les… Fur-iends !

Rigolo, hein ?

La version française, elle, traduit ce terme en Amimale ce qui est une idée tout a fait simple mais… assez géniale, ça serait donc bête de pas l’utiliser pour le reste de la vidéo ! Bref, ces amimales elles vivent dans une gigantesque zone – une île, à priori – nommée le Japari Park. Et dans ce Japari Park elles essaient de vivre leurs vies, tranquilou, sachant qu’elles ont un petit problème: le parc est souvent attaqué par des monstres difformes et ténébreux nommés les Céruléens, qui sont une menace pour nos héroïnes vu que si elles se font absorbées par ces entités, elles redeviennent des animaux “normaux”… Sale histoire !

Ca c’est la base de l’univers de Kemono Friends qui au départ va surtout vivre grâce à deux médias: le premier c’est un manga assez léger mettant en scène les héroïnes dans une ambiance plutôt tranche de vie et le second, qui va être la priorité au lancement, c’est un jeu mobile ! Développé par Nexon, le jeu reprend des bases similaire à des titres comme Fate Grand Order: beaucoup de textes à lire, des combats façon RPG tour par tour et surtout beaucoup de personnages à tirer dans le gacha ! Lancé en mars 2015, le jeu sera très vite….

… un gros flop. 

Passant assez inaperçu dans un marché déjà saturé, Kemono Friends va avoir un public très limité, et l’espoir des producteurs va se porter sur une éventuelle hype qui pourrait être créée par l’adaptation animée, qui est mise en production à partir de la moitié 2015 pour une diffusion début 2017. Le créneau de diffusion est réservé, et le projet est confié à un jeune studio – Yaoyorozu, connu jusqu’ici pour la série des… Tesagure Bukatsumono, série assez niche mais assez unique parce que mine de rien, en 2013, cette série servait de précurseuse aux youtubeuses virtuelles ! Une grande partie des épisodes était ainsi improvisé par les actrices de doublage, qui discutaient de tout et de rien, discussion qui se retrouvait derrière remis en scène via les personnages en 3D de la série, qui leur servait ici d’avatar…. on est pas loin d’une collab Hololive ou Nijisanji classique, dix ans avant que ça devienne populaire ! 

Les héroïnes de Tesagure Bukatsumono, tristes et en 3D

Bref, l’animé commence sa production sauf que y’avoir vite un petit souci: le jeu mobile… bah il est annulé un mois avant le début de la diffusion.

Oups…

Kemono Friends: l’anime (et le miracle)

La franchise Kemono Friends a très vite été déclarée comme morte. En 2016 il est décidé de débrancher le jeu mobile après seulement un an et demi de vie, sauf que du coup les producteurs – à commencer par la société Kadokawa – et bah ils sont un poil emmerdés: l’animé est toujours en production et comme les créneaux de diffusion durant la saison d’hiver 2017 ont été achetés bien à l’avance, on peut pas juste tout annuler, faut fournir aux chaînes ce qu’il avait été prévu de passer et tu peux pas vraiment sortir un animé à la dernière minute pour remplacer Kemono Friends. Du coup, l’animé est maintenu mais on passe en mode gros rat normand: l’objectif pour les producteurs va être de PERDRE LE MOINS D’ARGENT POSSIBLE. En conséquence, la série va être produite avec des moyens ridicules: certaines sources indiquent même un budget de 8000€ par épisode. Pour comparer, un épisode d’anime classique on est plus dans une fourchette allant de 70 000 à 100 000€ donc là on est sur un animé financé à environ 10% du budget habituel…

Du coup chez Yaoyorozu, on se retrouve sur un projet produit avec un planning très serré, très peu de moyens, un staff limité à dix personnes, des actrices débutantes, le tout pour promouvoir un univers lié à un jeu mobile dont la mort est prévue et annoncée. Pas très motivant, hein ?

Mais c’est là que le réalisateur du projet, un jeune homme nommé TATSUKI, va se dire que du coup… bah il a totale carte blanche. Personne le surveille et personne lui fait d’exigence vis à vis du contenu parce que, finalement, la seule chose qui intéresse ses supérieurs c’est que le truc sorte en perdant le moins de thunes possible… Et TATSUKI c’est quelqu’un qui aime bien l’univers de Kemono Friends. Pas étonnant quand on sait qu’il a passé toute son enfance et son adolescence à vivre au Kenya, pas loin des grandes réserves. Amoureux des animaux, il a pour l’univers de Kemono Friends un petit coup de cœur donc il se dit « allez fuck it personne le matera cet animé mais je vais faire en sorte qu’il me plaise au moins à moi-même« . 

Du coup après une production très compliquée, l’animé démarre le 10 janvier 2017. Comme prévu, c’est un animé fait avec un bâton et trois bouts de ficelle: la 3D est pauvre et raide, les décors brillent par leur sobriété, les actrices sont inexpérimentées, les combats entre amimales et Céruléens sont pas vraiment très animés… Bref, c’est compliqué ! Mais ! Sur Internet ! quelques personnes jettent tout de même un œil à la série et ainsi les premiers retours se font et… 

La page MAL de Kemono Friends peu après la diffusion du premier épisode – notez le 4.54

… non y’a pas de miracle, majoritairement, sur les réseaux sociaux et les sites de critique, tout le monde se fout de la tronche de l’animé.

Idem lors de la diffusion de l’épisode 2.

Idem lors de la diffusion de l’épisode 3.

Mais… étrangement… chaque semaine… les moqueries se font un peu moins acerbes. On sent même que parmi ce public qui avait démarré la série pour du bon vieux hate-watching y’a quelque chose qui commence à changer, et on commence même à sentir une certaine affection posant du coup cette question: et si, en vrai, l’animé était… sympa ? 

Extrait de la page MAL le 2 avril 2017, soit cinq jours après la fin de la série. La note est étrangement meilleure !

Parce que plus les épisodes défilent, plus l’univers de Kemono Friends montre une certaine… richesse. Les personnages défilent avec des caractères très colorés, soutenus par les designs assez adorables de Mine Yoshizaki. La relation qui lie les deux héroïnes – la vaillante Serval et surtout la mystérieuse Cabas, une humaine amnésique qui va découvrir Japari Park et ses mystères – gagne en profondeur au fur et à mesure. Les épisodes sont ponctués de petites interviews sympas de personnes travaillant dans des zoos, qui présentent souvent les animaux stars de chaque épisode. Et puis surtout l’univers de la série semble riche et rempli de rebondissements inattendus !

De nombreux mystères se créent et commencent à vraiment capter l’intérêt des spectateurs et spectatrices: pourquoi y’a vraiment aucun autre humain ? Pourquoi toutes les constructions semblent abandonnées depuis des siècles ? C’était quoi Japari Park, avant ? C’est qui Cabas, c’est quoi son passé ? D’où viennent les Céruléens ? Pourquoi le générique de fin il montre des photos de zoos et de parcs abandonnés ? Pourquoi y’a Pripyat dedans ? 

Très inattendue cette grande roue, non ?

Et bah mine de rien, tout le monde commence à se prendre au jeu ! D’abord moquée, la série attire peu à peu des vrais compliments sincères, principalement grâce à son écriture, et ses défauts les plus évidents commencent à faire partie de son charme, y compris – et même surtout – la 3D très basique. C’est un animé qui derrière son interface vétuste a du charme, a du cœur et a des idées, porté par un staff passionné par le projet, qui donnent tout ce qu’ils ont malgré toutes les difficultés qu’on leur a flanqué sur leur chemin.

Kemono Friends va devenir, grâce aux réseaux sociaux, un vrai phénomène au sein du public japonais et faire le Buzz avec un double Z. Porté par son univers et ses personnages, la série va également être une sorte d’underdog, un David face au Goliath qu’est tout le reste de la production animée de l’époque. Et comme en plus de ça la série va parvenir à garder ses qualités d’écriture jusqu’au bout, proposant des rebondissements intéressants et une conclusion vraiment bien faite, pas dénuée d’une légère pointe d’émotion, la série saura garder toute la bonne volonté et la bienveillance de son public, qui va très vite vouloir la soutenir ! Quand les Blu Ray sortent, ils se retrouvent ainsi à faire des chiffres ahurissants, qui égalisent ni plus ni moins que deux des plus gros succès de cette période là, c’est à dire Love Live Sunshine et Yuri on Ice.

Grape-kun 🐧🐧

Des zoos vont commencer à faire des collabs Kemono Friends et recevoir en réaction des nuées de visiteurs, sauvant même certains établissements de la faillite ! Sans oublier les grandes histoires, comme celle du petit Grape-kun, un pingouin tombé amoureux du carton du personnage de Kemono Friends qu’on avait mis dans son enclos… une histoire toute mignonne, qui va charmer les japonais mais aussi les attrister puisque le pauvre petit oiseau, agé de presque 20 ans, va mourir de maladie quelques mois après, créant une petite vague d’émotion dans le pays… 

Bref, l’avenir s’annonce bien: pour remplacer le jeu mobile, des nouveaux jeux sont annoncés, en plus d’une saison 2 pour l’anime, dans l’enthousiasme général.  Kemono Friends, grâce surtout à la passion qu’à mis TATSUKI et les membres de Yaoyorozu dans le projet, est devenu un vrai succès, au nez et à la barbe des producteurs qui sont malgré tout ravis de voir ce projet censé être mort être devenu une machine à imprimer de l’argent en masse !! Que des bonnes nouvelles et c’est donc pour ça qu’en septembre 2017, le principal producteur, Kadokawa, décide de récompenser Tatsuki et Yaoyorozu de la manière la plus naturelle et logique qui soit c’est à dire en les virant et en les menaçant de poursuites judiciaire.

…Hein ?

Kemono Friends, après l’anime

TATSUKI viré de Kemono Friends ! Quel choc !

Les raisons sont en plus assez vite fumeuses: Kadokawa reproche surtout qu’un épisode bonus aurait été fait sans leur accord, mais vu qu’il avait été fait avec l’accord de Mine Yoshizaki et d’autres membres du comité, on sent très vite que c’est une excuse un peu pourrie. On comprend assez vite, en lisant entre les lignes, que Kadokawa aimerait juste prendre le contrôle total de la franchise et la contrôler de A à Z, parce que maintenant qu’elle génère du pognon ah bah soudainement ils veulent s’impliquer un peu plus dedans !

Kemono Friends saison 2 reste en production, mais évidemment change de studio – on passe chez Tomason – et de réalisateur – puisque TATSUKI est remplacé par Ryuchi Kimura, connu surtout pour avoir dirigé la longue série Aikatsu, pas dénuée de qualités. Le changement reste tout de même pas spécialement bien digéré par les fans de Kemono Friends, et même par le reste de l’industrie – en avril 2018, la série Last Period, une sorte de parodie des jeux à gacha, va dédier un épisode sur tout un pays qui se révolte parce que, pour gagner plus de thunes, un vil empire maléfique décide de remplacer le joyeux directeur d’un zoo que tout le monde adorait. Et histoire de rendre le message plus subtil, l’épisode est fourré de références… très discrètes…. à Kemono Friends. Bref, les gars de chez Kadokawa passe pour des bouffons mais ça ne les fait pas abandonner pour autant puisque nous voilà en janvier 2019 et comme annoncé, voici la saison 2 de Kemono Friends. Et elle est….

… bah pas ouf hein.

Cabas disparaît complètement pour laisser la place à un jeune héros, Kyuru, lui aussi amnésique, qui va s’allier à Serval et à une nouvelle héroïne féline, Caracal, pour explorer le parc et essayer de résoudre de nouveaux mystères. Globalement c’est une saison qui manque beaucoup… d’identité. Son intrigue a du mal à se distinguer de celle de la saison 1, les nouveaux personnages introduits manquent clairement de profondeur et techniquement c’est assez bizarre ! La 3D est un poil plus peaufinée mais elle reste très proche du style de la saison 1, toujours assez limitée et assez raide. Mais là où la saison 1 le faisait par un manque clair de temps et de moyens, et essayait tout de même de tirer le mieux qu’elle pouvait du peu qu’elle avait, la saison 2… n’a plus ses excuses là.

Les moyens sont censés être bien plus élevés, il y’a beaucoup plus de staff attribué au projet du coup il est clair que l’animé limite volontairement sa qualité visuelle. Et croyez bien que voir des animateurs 3D qui se limitent volontairement non seulement ça se voit mais en plus ça n’a pour ainsi dire aucun interêt – idéalement, quand on mate une série, on veut mater quelque chose où tout le monde essaie de donner le maximum de lui-même, non ? Bon bah là non, on a quelque chose où, de base, des gens doivent absolument pas faire “trop” bien, et c’est presque déprimant.

La trad fr reste… au poil

D’autant que, sans trop dévoiler, c’est aussi une saison 2 qui par moment chie explicitement sur des éléments d’intrigue de la saison 1 ! Ainsi elle détruit volontairement la relation qui avait été crée entre Cabas et Serval, qui manifestement se sont séparées et se sont isolées l’une de l’autre sans parvenir à donner une explication très claire, tout ça pour promouvoir au maximum le nouveau héros-approuvé-par-Kadokawa, c’est à dire Kyururu qui est bien sympathique… mais n’a JAMAIS l’alchimie ou la complicité qu’avait Serval et Cabas. 

Rajoutez à cela tout le bordel engendré par le producteur principal de cette saison 2, un mec absolument abject qui passait son temps – sous pseudonyme – à insulter et menacer les fans de Kemono Friends sur Twitter EN PLUS d’abuser de son autorité pour essayer de coucher avec les jeunes doubleuses qui travaillent sur la série, Weinstein style. Il a été viré quelques mois plus tard et semble aujourd’hui blacklisté de l’industrie, tant mieux, mais les dégâts qu’il a causés sur Kemono Friends sont clairement irréparables. 

Du coup la série… n’a clairement pas été bien reçue. Des 80 000 Blu Ray vendus pour le premier disque de saison 1, on est passé à… à peine 800 pour le premier de la saison 2, soit une chute de 90%, signe d’une punition immédiate. Si la franchise reste active et populaire via ses nouveaux jeux vidéo – principalement ses bornes d’arcade et ses petits jeux à licence, genre un Picross thématique -, l’aventure va s’arrêter ici pour l’anime Kemono Friends – presque cinq ans après, pas de saison 3 au programme. Et en même temps, les fans n’accepteront clairement pas une suite à Kemono Friends sans Tatsuki, ce qui apparaît improbable vu la tension qui existe toujours entre le réalisateur et Kadokawa, très logiquement…

Du coup Tatsuki et Yaoyoruzo, ils deviennent quoi ? Et bah en janvier 2019, pendant que démarrait Kemono Friends 2, le studio et son réalisateur lançaient un nouveau projet, Kemurikusa.

On reste sur une 3D assez sommaire, mais cette fois-ci dans un univers et avec des personnages intégralement crées par Tatsuki. Comme Kemono Friends, la série met quelques épisodes à trouver son rythme et à finir de présenter son univers, mais ne manque pas de profondeur. Elle trouvera du coup son petit succès au Japon, avec là aussi des ventes assez surprenantes, la série se vendent même dix-sept fois plus que la saison deux de Kemono Friends, ce qui est peut-être le plus beau cheh que Kadokawa peut se prendre dans la gueule – et ils le méritent !

Kemono Friends et le pouvoir du coeur 

Kemono Friends c’est un animé assez unique, toujours aujourd’hui. Fauché comme les blés, tous les défauts sautent immédiatement à la tronche et il faut une certaine dose de curiosité et même d’ouverture d’esprit pour passer à travers. La série le sait, et choisit donc de récompenser les membres du public qui font ces efforts en… les respectant, purement et simplement. Avec son écriture soignée, ses personnages hauts en couleur et ses mystères vraiment amusants, Kemono Friends est une série qui aime l’univers qu’il dépeint et a envie de transmettre cette passion à son spectateur.

Mais pour moi, surtout, Kemono Friends est un animé intéressant au sein du paysage moderne de l’animation japonaise, qui démontre quelque chose d’important. Parce que aujourd’hui la tendance niveau animation c’est d’en faire toujours plus: la qualité technique et visuelle des séries du moment sont désormais soumises à des attentes du public qui sont excessivement élevées tant ça a escaladé ces dernières années.

Ça amène des studios comme MAPPA à vouloir à tout prix proposer les trucs les mieux animés de tous les temps, mais sans pour autant avoir la structure et le système de production qui permet de le faire de manière saine et cohérente, broyant purement et simplement les animateurs et les réalisateurs au passage. Donc non seulement on produit de plus en plus d’animés, mais le public s’attend à ce qu’ils soient de mieux en mieux produits, ce qui est impossible pour, allez, 90% des studios – les 10% restants étant les Kyoto Animation ou bien les ufotable qui se sont développés et se sont organisés pendant des décennies entières pour arriver à ce niveau de qualité.

Et dans tout ça, on a donc Kemono Friends.

Produit avec trois francs et un Mars, ce ne l’a pourtant pas empêché de trouver son public et d’avoir un succès incroyable. Et ce succès ce n’est pas parce qu’il serait devenu un meme, ou parce qu’il a attiré la pitié des gens, ou parce qu’il aurait bénéficié d’un plan marketing méga vener, très loin de là… Non, c’est une série qui a des fans nombreux, des fans sincères, des fans de tous les âges. Et ça c’est principalement parce que la série a été réalisée avec amour et que ça se ressent. Parce que son écriture est si soignée, si détaillée, qu’il est difficile de ne pas voir la passion du staff pour cette œuvre. 

C’est ça que Kemono Friends dit et qui n’a pas été si écouté que ça: peu importe les moyens, si tu es passionné par l’œuvre sur laquelle tu travailles, si tu l’aimes, alors le public va l’entendre et le ressentir. La passion est souvent cette étincelle supplémentaire qui distingue les bons animés de ceux qui vont marquer leur public, marquer leur temps, trouver le succès. Tu peux accumuler les animateurs talentueux autant que tu veux… si derrière ton staff s’amuse pas, alors y’a peu de chance que le public s’amuse aussi.

L’animation japonaise ce n’est pas que du visuel, de la technique, c’est aussi des sentiments, et ça Kemono Friends, à son échelle, essayait, avec en plus cette qualité rare qu’est la sincérité, de nous le rappeler…

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Un commentaire

  • Doam

    Wah c’est fou comme ton analyse est juste ! J’avais maté kemono friends en 2018 sans rien savoir, je ne m’attendais à rien et l’histoire m’a totalement happé. Par contre j’ignorai tout du contexte entourant la série, content de pas avoir trouvé la saison 2 du coup. Merci pour cet avis d’expert Amo, tu fais du super boulot.

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