Noël, 19 ans: « Mon expérience avec Hitohira »
Il m’avait donné rendez-vous à 14h30 dans ce café de la région brestoise. La méthode d’invitation avait été étrange: une simple lettre, contenant une adresse, une heure, une photo et un billet de train, juste ce qu’il fallait pour titiller ma curiosité. Je ne savais pas dans quoi je me dirigeais, et si cela se trouvait, jamais je ne quitterais Brest, mais j’étais prêt à tenter le coup. Quand j’arrivais dans ce café, qui sentait le beurre et le whisky, j’étais surtout fatigué: le voyage avait été long, me demandant trois correspondances et un départ à huit heures du matin, ce qui signifiait surtout un lever à sept heures du matin, quelque chose d’inacceptable pour mon organisme. Mon esprit embrumé était donc peut-être une raison légitime au fait que je n’avais pas reconnu mon contact immédiatement. Le pauvre garçon me faisait des signes de main franchement évidents depuis une bonne minute quand enfin je saisis que cela m’était adressé. Je pris aussitôt le choix de faire comme si de rien n’était, histoire de lui montrer mon mental d’acier, et de garder un peu de fierté dans l’histoire. Je m’assis à la table, il prit aussitôt la parole.
« Vous êtes… Amo ? »
Un petit sourire vint répondre immédiatement à sa question. Évidemment que je suis Amo, j’ai le chapeau, la veste, les cheveux blonds qui luisent au soleil, le gras qui tient chaud l’hiver et encore plus l’été, quant à la petite taille que tous m’envient secrètement, elle était présente. De toute façon si j’avais été un inconnu lambda, je n’aurais pas répondu à ses signes de mains franchement étranges. Je pris aussitôt la décision de prendre une voix résolument rassurante, pour la simple raison que le jeune garçon, au physique franchement banal par ailleurs, ne semblait pas totalement à l’aise. Je crus percevoir un instant un léger tremblement au niveau de sa main droite, et son regard semblait observer les alentours avec insistance, comme dans les pures traditions de paranoïa romanesques.
« Bien sûr, je suis Amo. »
Il poussa un long soupir de soulagement. Je pouvais le comprendre après tout, son billet de train avait coûté cher: si je n’étais pas venu, il aurait envoyé de l’argent dans le vide. Enfin, c’est comme cela que j’interprétais son soupir et son début de joie. Il prit aussitôt la parole, beaucoup moins tendu:
» – Je m’appelle Noël, j’ai 19 ans… et je dois vous parler de quelque chose. »
Bien entendu. Il ne m’avait pas invité pour observer mon visage. Je le laissa continuer.
« – Quelque chose que je ne peux parler qu’a un blogueur influent comme vous. »
J’eus un début d’érection en entendant l’adjectif influent mais je devais être fort, et essayer de garder une facade humble et modeste. Je me contenta d’osciller un peu de la tête en imitant du mieux que possible l’expression faciale de Georges Clooney dans les pubs Nespresso, ce qui devait l’encourager à continuer et me déballer ce qu’il a sur le coeur. Quelque chose réservé à un blogueur ? Qui plus est, influent ? Pourquoi m’a t-il contacté moi et pas un autre blogueur d’ailleurs ? Ca devait être la proximité géographique… Oui voilà ça devait être ça…
» – J’ai vu… Hitohira.
– What the Fuck !!? »
Qu’est-ce que c’était que ça ? Hitohira ? C’est une marque de bière ? De quoi me parlait-il ? J’avoue que j’étais un peu abasourdi. Il semblait avoir compris cela en voyant mon visage soudainement privé d’émotions. Il fouilla dans son sac pour en sortir une feuille, qui contenait déjà toutes les informations nécessaires…
Hitohira
12 épisodes
Studio: XEBEC
Sorti: Avril 2007
Scénario: Asai Mugi est une jeune fille extrêmement timide, paralysée dès que par exemple on lui demande de parler en public. Mais malgré tout, elle se retrouvera embrigadée au sein du « club de recherche théâtral »… Cette jeune fille timide à en mourir arrivera t-elle à s’en sortir dans un art qui n’est à priori pas fait pour elle ?
C’était mince mais suffisant. C’était donc un anime… Sorti en 2007… Et produit par… Xebec ? Pour la première fois depuis une minute, j’ouvris la bouche:
» – Je comprends pourquoi je connaissais pas… Xebec… Et sorti en 2007, au milieu de trucs comme Baccano!, Gurren Lagann, Lucky Star… Aucune chance que les gens le gardent en mémoire mais… un point sur ce dossier est intéressant…
– Je pense savoir lequel vous intéresse…
– Ha ? »
Je commençais à comprendre. Si cet homme m’avait choisi pour me parler d’Hitohira, c’est qu’il avait fait des recherches sur moi. Il savait pourquoi cet anime allait me parler, même produit par Xebec. J’avais le sentiment d’être pris au piège. Prenant énormément sur moi même pour ne pas laisser transparaître mes émotions, je choisis de prendre les devants, après tout je venais de relire l’intégralité de Death Note, j’étais donc passé expert dans l’art du combat psychologique :
» – Vous savez que j’ai fait longtemps du théâtre, c’est ça ?
– Exactement.
– Ok, donc si vous aviez vu les Gouttes de Dieu, vous auriez demandé à un blogueur alcoolique de venir ?
– Totalement.
– Bien, vous êtes félé mais je vais quand même reprendre: j’imagine que vous… tu sais bien que je peux pas saquer les productions XEBEC alors pourquoi vouloir m’en parler ? Qu’est-ce que cet anime a de si spécial ? «
Il ne répondit pas immédiatement, préférant m’observer un instant. Il semblait remettre ses pensées en place un instant. Peut-être que j’avais touché une corde sensible, peut-être qu’effectivement il n’y avait pas grand chose à dire sur Hitohira et que tout cela était du gachis et qu’après tout, il aurait très bien pu m’envoyer un mail avec le nom de la série et le lien d’un torrent… Il sembla reprendre conscience un instant, et reprit son discours:
» – Cet anime est…un énorme gâchis. Mais avant je vais vous parler un peu de moi. Je me suis mis dans l’animation japonaise y’a quoi… presque cinq ans maintenant ? A la base, je matais juste Death Note pour faire plaisir à un pote, puis j’ai découvert des trucs comme Black Lagoon, Gurren Lagann, Code Geass… A partir de là j’ai maté de plus en plus d’animes, j’ai même regardé la quasi-intégralité de la saison d’été 2010, vous savez ce que ça fait de mater l’intégralité de Ookamisan ? Ou de Seitokai Yakuindomo ? Bref, j’ai subi fin novembre une attaque cérébrale, purement et simplement, à cause de la putain d’annonce de la putain de saison 2 de Mitsudomoe. C’est là que j’ai compris que je faisais tout mal ! J’avais plein d’animes du passé, certains de qualité, qui m’attendaient, les bras grands ouverts… Vous savez c’est quoi ma plus grande fierté sur MyAnime List, Monsieur Amo ?
– Ne pas y être inscrit ?
– Non, carrément pas, j’y suis totalement inscrit. Non, ma fierté est de ne jamais avoir droppé ou mis en on-hold le moindre anime, même si il est mauvais, je finis toujours ce que j’ai commencé. Par exemple une fois, un pote a voulu me montrer les cinq premiers épisodes de Dragon Ball, j’ai maté le reste de la série en moins d’un mois pour boucler mon MAL et pas laisser un anime imparfait traîner dans ma liste. C’est quelque chose que je prends très à coeur.
– Et je suis sûr que ça va être important dans l’avenir, cet élément.
– Bien entendu. Donc comme je disais, j’avais décidé de me ressourcer et de repartir vers des vieux animes. Toujours les consommer à rythme industriel mais cette fois ci ils seraient vieux. Et un de mes premiers choix a été justement Hitohira.
– Choisir un XEBEC… C’est osé. Et considérer un anime issu de 2007 de vieux tout aussi.
– Haha… Je suis parti du principe que c’était un nom inconnu donc que si jamais je découvrais que c’était une tuerie, je découvrais un diamant caché dont je pourrais m’attribuer les mérites. Mais j’ai oublié une règle importante: si un anime est inconnu, c’est souvent qu’il y’a une raison… »
« Certes, le scénario est pas forcément folichon: ok, encore une histoire qui se passe dans un lycée, ok, encore une histoire de club, de fille qui y est engagée alors qu’a la base elle y connaît rien et qui en fait cache un grand talent au fond d’elle. C’est très K-On avant l’heure, sauf qu’ici on a des garçons. Mais malgré tout je dois l’avouer, le premier épisode possèdait certaines promesses. L’héroïne était très moe-kawaii-desu tout ça, juste ce qu’il fallait pour ne pas sombrer dans la niaiserie tout en devant extrêmement… oui je ne vais pas le nier… excitante grâce à sa timidité, je surkiffe les timides voyez vous… Alors quand en plus a coté y’avait sa copine genki-energique qu’elle tient par la main à la première occasion, allumant tous les capteurs à yuri, on est évidemment enthousiaste, en tout cas je l’étais. Du yuri, des filles qui rougissent et du théâtre. Ok, je dois l’avouer par contre, l’ending est une torture… SMILE ! SMILE ! NIN NIN NIN NIN NIN ! (il tente d’imiter un air au rythme très décousu et vite insupportable) … et l’opening est tellement cheap que l’héroïne a juste pas la même coupe de cheveux dans le début de celui-ci. Ils ont du changer le chara-design a la dernière minute et pas la possibilité de changer le plan en question, bon bref. Malgré ça, tu vois, j’étais parti confiant. Alors quand en plus on voit une review sur MyAnimeList qui lui met un 9…
– Donner de la crédibilité aux reviews random de MyAnimeList… est une erreur. Et tu le savais.
– Bien sûr que je le savais ! Mais je voulais y croire. Et je n’ai pas parlé des personnages composant ce fameux groupe de « recherche théâtral », dont la fabuleuse Nono. Une sorte de coodere mais avec des couilles, au sens mental du terme. Une sorte de fusion entre une pute machiavélique et Nagato Yuki, non, franchement c’était très bien parti. Même l’animation était pas trop cheap. Holala… Si je savais ce que ça allait donner par la suite. Dès l’épisode 2, ayé, c’est le début de la violence: plans fixes à foison, beaucoup beaucoup de dialogues pour compenser. Hitohira devient d’amblée une série extrêmement bavarde, et rassurez moi hein, on peut pas apprendre une pièce juste en lisant le bouquin ?
– On a essayé une fois, on a eu des problèmes, effectivement. Mais bon, les animes en général n’ont jamais été très réalistes sur la manière de faire du théâtre. Apprendre Romeo & Juliette en quinze jours ? Il n’y a que K-On! pour tenter ça… Enfin bref.
– Voilà, c’est ça qui est amusant. Tu crois qu’en matant Hitohira tu vas en apprendre plus sur la manière de faire du théâtre, mais non. Tout ce que tu as, c’est sans doute les clichés classiques. Ils répètent jamais vraiment, on a l’impression que parfois ils foulent la scène pour la première fois le jour de la représentation alors que tu dois répéter sur la scène qui va te servir au moins une fois bien avant. Toutes leurs répétitions c’est de la lecture, c’est bien de le faire au début, mais eux le font tout le temps, ça marche comme ça au Japon ou quoi ? Enfin bref, on va pas demander énormément de rigueur non plus, c’est pas le sujet, mais c’est un peu du gâchis. »
« A partir de là on entre dans une sorte de quatrième dimension. On a vraiment l’impression que les enjeux de la série deviennent importants – pour Mugi, c’est le combat contre sa personnalité renfermée, Nono doit faire face à une menace de paralysie des cordes vocales, la copine blondasse un peu chiante tombe amoureuse du bellâtre du groupe, le club de recherche théâtral joue son existence contre le club de théâtre, on apprend peu à peu le passé lourd de Nono et de la gérante du club de théâtre, quant au duo frère & soeur du groupe, eux… (il s’arrête un moment et semble réfléchir) … hum… ne servent à rien. Il y’a pas mal d’enjeux qui s’inscrivent quoi, et c’est pas tous les jours que ça arrive dans un slice of live kawaii-moe dans le genre. Mais le problème est là: on y croit pas une seule seconde. La réalisation est tellement cheap… Elle est incapable de mettre en valeur quoi que ce soit, ou de donner un peu de consistance à des scènes importantes… Le club devient tellement tendu qu’il s’engueule et se bat à coup de poings ? On en a strictement rien à foutre. Et parfois ça prend son temps mais ça devient long… mais long…
– Sans vouloir interrompre, peut-on reparler un instant des scènes de théâtre ? As t-on des représentations au moins ? De la scène ? Comment ça se passe ? »
La réponse de sa part fut immédiate: il sortit de son sac un petit écran portable, chargé sur un épisode d’Hitohira, me tendit un écouteur (il ne fallait pas troubler trop la quiétude du public) et je pus voir un épisode entier dédié à une représentation du club. Les vingt minutes défilèrent très lentement, trop lentement même. Et là évidemment, une fois terminé sur l’horrible ending de la série, j’étais… attristé. Je pris la parole aussitôt:
« – C’est… n’importe quoi. C’est quoi ce bordel ? Donc pour la série le plus important n’est pas tes compétences d’acteur mais tes compétences de crieur ? On dirait que le seul objectif que poursuit Mugi c’est celui de gueuler le plus fort, et étrangement le public semble lui aussi convaincu de ce fait, vu à quel point il semble PUTAIN D’ORGASMER QUAND ELLE CRIE. Mais non, ce n’est pas… ça ! Le Théâtre n’est pas un jeu à qui criera le plus fort ! Il faut que ça soit juste ! Et là putain, c’est incroyable, mais l’anime a réussi à… faire jouer comme des pieds leurs propres personnages. C’est… terrible ! C’est une vision sur-naïve du théâtre !
– Ha, pour être franc je ne savais pas vraiment quel était le problème mais je pressentais qu’il y’en avait un. Mais au final c’est d’autant plus terrible que la pièce autour duquel est centré l’anime arrive au final plutôt tot dans l’intrigue… épisode 8 et 9… Du coup, on se demande ce que va raconter les derniers épisodes. Eh bien rassure toi: ça ne parle pas de théâtre. Pire ! L’héroïne est si heureuse d’avoir retrouvé un semblant de pèche à la toute fin qu’elle abandonne le théâtre. Paie ton message: investis toi dans un art puis dès que tu as eu ce que tu veux, tu peux laisser tomber comme une chaussette. A croire que le théâtre c’est là que pour guérir la timidité…
– Ce qui n’est d’ailleurs absolument pas le cas… Je peux en parler personnellement: le fait de faire du théâtre permet vraiment de mieux gérer le fait de parler face à des foules, je n’aurais peut-être jamais été présentateur d’activité pour une asso sans théâtre, mais ça ne guéris que très rarement les soucis de timidité qu’on peut avoir avoir une personne seule à seule ! Les témoignages sont assez nombreux sur le sujet… Pour être plus scientifique… Je dirais que ça crée plus deux « personnalités sociales »: une personnalité apte à se lâcher sur une scène / face à des gens, ce qui n’alimente pas du tout la personnalité « sociale » habituelle…
– Bref, que Asai Mugi soit devenue capable de telles prouesses sociales en moins d’un mois grâce au pouvoir du théâtre… c’est de la grosse connerie ?
– Totalement. Et pendant ce temps l’idée reçue continue de se répandre. »
» – L’autre déception que j’ai eu, c’est sur le yuri. Je vais pas vous raconter de la merde: j’ai maté ça avant tout pour le fait d’espérer voir deux filles faire leur coming out.
– Le pouvoir du tribadisme, oui… (je prends un air songeur))
– Oui voilà, vous voyez de quoi je veux parler… Cette sorte d’amour interdit… Avec deux paires de seins… Une tendresse romantique qu’on ne trouve nulle part ailleurs… Bah bref, là dessus, Hitohira nous tease comme jamais, mais n’a pas les couilles de confirmer le moindre couple à un seul moment. Qu’il soit lesbien ou hétéro d’ailleurs. On veut du yuri ? Bah on se contente des insinuations. Putain merci mais si je veux des insinuations yuri jusqu’a en crever, je mate K-On! quoi, c’était beaucoup mieux fait !
– Le pouvoir du tribadisme dans K-On, ah…
– Alors que putain, ça crève les yeux que Mugi veut des calins de Nono. Ca crève les yeux que Nono veut se faire Mugi, et QU’EN PLUS elle veut aussi se faire sa rivale. Toute cette tension mi-agressive, mi-sexuelle ne dupe personne. A quand un anime qui assume son teasing yuri a en crever ? Je veux dire, au Japon, c’est pas censé être normal les trucs lesbiens dans les lycées du Japon ? Je veux dire, avec leur système senpai/kohai mes couilles là. J’avais lu ça sur je sais plus quel site, bref, que c’était une sorte de norme. Du coup putain, un peu de réalisme quoi. Pourquoi les filles ont le droit à leurs 300 animes à yaoi explicites par an, et nous que dalle ? Hein, pourquoi autant détruire le yuri ?
– Tiens ça me rappelle cette phrase du genre « Si le yaoi a tué l’anime mecha, le yuri a tué le slice of life », un truc dans le genre…
– Ouais peut-être que ça dit vrai, mais soyons franc: le yuri a tué que dalle ! C’est les insinuations yuri qui font des massacres par milliers ! Peut-être sur le genre slice of life en lui-même mais aussi sur notre libido, sur nos fantasmes ! C’est pas normal de devoir payer des doujins hentai pour voir ce qu’on veut voir ! Les doujins hentai ne doivent pas être aux animes ce que les DLC sont aux jeux vidéo !
– Hola, c’est peut-être un peu exagéré comme propos !
– Ouais, peut-être. Reste que Hitohira m’a vendu du rêve et j’ai rien eu. RIEN. Je me considère comme victime d’escroquerie. Mais bref.
– Et sinon, on a les clichés habituels du genre ? Le club qui part en vacances quelque part par exemple ?
– Ah, ça c’est peut-être une des rares bonnes surprises du genre: on a effectivement l’habituel épisode de vacances, avec le club qui part à la plage, et évidemment une plage déserte hein, sauf que là ou c’est habituellement des épisodes funs, où le scénario part lui aussi se baigner ailleurs, là c’est juste un épisode important pour le scénario, et qui est carrément pas… fun. Les filles se battent, Mugi finit par partir en pleurant et à, attention ça va loin, tenir la main du mec inutile du groupe, Nono se révèle une grosse fasciste. Manque juste la pluie et les violons et, ayé, on est dans Rémi Sans Famille Mais Fait Du Théâtre ! Mais la pluie et les violons devaient coûter trop cher pour Xebec, et cet épisode est encore une fois pourri par l’animation minimaliste, l’OST faite au clavier bontanpi et par l’ending super energétique et super pénible qui cloture un épisode qui finissait un peu désespère. Je considère ça comme la version Lidl de la fin de l’épisode 16 de Clannad After Story…
– Putain, cet ending d’ailleurs…
– SMILE SMILE… NIN NIN NIN NIN. Putain je peux pas vous dire combien de temps je l’ai eu dans la tête, mais trop de temps, et là de toute façon rien que d’en reparler, il s’est à nouveau introduit dedans. C’est l’archétype même de la chanson super mauvaise. Je veux dire, même la chanteuse fait pas d’efforts pour bien chanter, même le studio de mixage fait pas d’efforts pour masquer ça. On a un truc au rythme super bizarre, qui reste dans la tête juste a cause de son putain de début, mais sérieux tu as envie de te buter et de retourner à l’époque ou tu avais du Alizé dans la tête, à la limite c’était plus… honorable ! «
» – Et le pire, donc, c’est la fin. Vous vous souvenez quand je disais que la pièce « centrale » arrivait à l’épisode 8/9 ? Et que là il reste quatre épisodes ? On se demande ce qu’ils vont faire, bah moi je vais vous dire ce qu’ils ont fait: du remplissage. La pièce est finie, Mugi s’est découverte un nouveau talent que de toute façon elle n’exploitera plus et là bam SURPRISE, sa copine genki qu’on n’a plus vue depuis huit épisodes annonce qu’elle se barre à l’étranger pour continuer ses études de photographe. HOLALALA SURPRISE TOTALE. Et devinez quoi ?
– On… en a rien à foutre ?
– Bingo ! Sa copine, on l’a plus vue depuis l’épisode deux, enfin je veux dire qu’elle avait plus le moindre rôle depuis cet épisode, du coup qu’est-ce qu’on est censé avoir à foutre de son départ ? Et Mugi, elle a pas vécue six mois sans trop la voir du coup ? Qu’est-ce qu’elle nous pète un cable genre « putain ma meilleure pote se barre, je pleure, je veux plus vivre » ? Elle a pas de nouveaux potes en plus pour… compenser ? Et là on part dans des longues réflexions internes à Mugi genre « en fait je dois vivre pour moi, plus pour elle », ces conneries dans le genre holalala qu’est-ce qu’on en a à foutre à la fin, baise avec quoi ! Je veux dire. Et puis d’ailleurs quand on y pense, sa copine genki elle exagère pas grave de toute manière ? Genre « j’aime bien faire des photos, je vais partir aux STATES » ? Elle va pas attendre de finir le lycée avant, non elle doit tout faire tout de suite ?
Mais holala ça sort de nulle part, et du coup la fin de la série part totalement là dessus, d’autant que Mugi doit en plus gérer le départ de Nono, qui lui dit adieu en lui foutant une baffe, si je me souviens bien. Bref, super chiant. Ca traîne en longueur comme jamais, et au final, bam, elle a une illumination divine genre « je pourrais l’appeler par téléphone donc ça va » et voilà, BAM, FIN DU DRAMA.
– Et tout est bien qui finit bien ?
– Ouais, à priori. Mugi devient super sociale comme par magie, elle devient je sais pas trop quoi et montre qu’elle peut vivre sans Nono et sa copine genki, ce qui est sympa comme tout mais on avait pas besoin d’autant d’épisodes pour en arriver à cette conclusion. Et on a toujours pas eu de yuri, quant à son copain, il est condamné à devenir le meilleur ami éternel alors qu’il semble en vouloir plus, mais bon c’est un anime, c’est pas comme si ça savait dépeindre les relations amoureuses, hein. »
« – Donc ok si je comprends bien, Hitohira est l’archétype même de l’anime pétri de bonnes intentions mais incapable d’assurer à cause d’un budget limité ?
– J’aimerais bien dire ça…
– Oui, je vois. Le problème est pas tellement issu du budget, mais bien du… studio, non ?
– Voilà.
– Car au final c’est peut-être une excuse un peu idiote ça le « ils ont pas de budget. ». Un studio, si il a du talent, compense le manque de budget avec plein de petites astuces de réalisation… J’ai même envie de dire que c’est là qu’on voit qu’il a du talent ! Mais là c’est Xebec… Qui au final a fait du très très classique, sans se casser la tête. Ils avaient un budget limité ? Ils allaient pas se casser le cul et faire juste avec. Pas d’astuces, pas de moyen de compenser. Juste un truc sans ambitions.
– C’est exactement ça. Maintenant, j’exagère peut-être: Hitohira, en l’état, est peut-être… agréable. C’est juste qu’on y ressent… rien. Et puis putain cet abus de beige. Y’a du beige PARTOUT dans cette série… Enfin bref je ne dirais pas que c’était à chier, juste que c’était moyen. A l’école, c’est une rédaction à 10/20 quoi.
– Mais alors ma question suivante c’est ça: pourquoi m’avoir venir d’aussi loin pour un anime qui de toute évidence est juste un truc dans la moyenne ? Je veux dire, c’est même pas une grosse merde dont on aurait pu se foutre de sa gueule pendant quatre heures de discussions alcolisées… et d’ailleurs ton avis sur l’anime est le même que le mien ? Car tu as dit plus tôt que tu as vu mon MAL: tu savais que j’avais vu Hitohira, j’ai joué le jeu comme si je ne l’avais pas vu, pour entrer dans le tien, mais pourquoi ? Pourquoi autant de prise au sérieux simplement pour Hitohira ? Il y’a un message caché à cet anime ? Pourquoi ?
– Pourquoi ? (il lâcha un petit rire sardonique) Parce qu’on est pas vraiment à Brest…
– Hein… ? »
Autour de moi le café commençai à s’écrouler. Le barman, jusque là un gros barbu, se métamorphosa sous mes yeux, devenant une jeune femme aux cheveux beiges, au sourire léger, et à l’uniforme beige caractéristique. C’était Nono ! Comment… Je me retournai vers Noël, qui souriait maintenant comme un dément… un sourire figé, certainement pas rassurant, accompagné d’une paire de gros yeux qui rajoutais plus de glauque qu’il n’en devenait nécessaire… Par réflexe, je jetai un oeil vers le plafond, qui risquait lui aussi de s’écrouler, et cette fois-ci sur moi…
Il n’y avait plus de plafond. Il s’était volatilisé. Je voyais juste une pleine lune. Il faisait déjà nuit noire. C’était impossible, j’étais entré en début d’après-midi… Il ne pouvait pas s’être écoulé autant de temps… Et Noël qui continuait à sourire comme Jack Skellington, à part que c’était un putain d’être humain, pas un squelette de chez Disney ! Je n’osais pas me retourner, mais je savais que Nono était derrière moi. Je m’agrippais à la chaise, dans l’espoir de ne pas en être renversé. Grossière erreur, mes poignets furent automatiquement entourés par des sortes de menottes et j’étais désormais prisonnier de cette chaise, dans ce qui était maintenant les ruines d’un café. Et où étaient les autres clients ? Ils avaient été assassinés pendant que j’avais le dos tourné, c’est ça ?
Comme pour répondre à ma question, derrière Noël apparut quelqu’un… J’ai pris un peu de temps avant de le reconnaître… Une veste noire par dessus une sorte de pull rouge, une paire de lunettes caractéristique, une légère barbe noire, des gants blancs, ce regard dur… Il ne manquait que le vieux pépé qui l’accompagnait toujours mais je ne pus que me rendre à l’évidence. J’avais affaire à…
« – Gen… Gendo Ikari ?
– Oui. »
Aussitôt, je commençais à tout comprendre. Je comprenais pourquoi j’étais à Brest. Je comprenais pourquoi malgré le fait que je sois à Brest, je voyais la tour Eiffel depuis la fenêtre. Je comprenais pourquoi, depuis le début, je n’arrivais pas à bien percevoir le visage de Noël. Je comprenais pourquoi j’avais oublié exactement où j’avais pris mes trois correspondances de trains. Je comprenais pourquoi je voyais des requins marcher derrière Gendo. Je comprenais pourquoi Gendo était là. Je comprenais pourquoi au début je connaissais pas Hitohira et pourquoi à la fin je savais tout sur cet anime parce qu’en vérité je l’avais vu. Je comprenais pourquoi des screenshots venaient me harceler mentalement à certains moments. C’était clair. C’était limpide désormais. Aussitôt, je m’exclamai, de ma plus forte voix, dans le pure style théâtral cher à Hitohira:
« C’EST UNE PUTAIN D’INCEPTION ! POUR ME FORCER A ÉCRIRE SUR NÉANT VERT !
– Gagné. Maintenant, réveille toi. »
Je n’eus pas le temps de répondre que brusquement je sentis un impact lourd dans l’arrière de mon crâne, ma dernière pensée maudissant Xebec. De toute mon âme.
12 commentaires
Le Commandant
J’applaudis…You need to go deeper…
Axel Terizaki
Ce qu’Amo ne révèle pas c’est que c’est plus ou moins moi qui lui ai fait mater Hitohira. 😀
J’avais apssé un bon mmoment quand même sur cet anime, peut-être parce que je suis meilleur public et que les défauts que tu cites ne m’atteignaient pas. Après, je l’avais vu en 2007, à sa sortie, ce qui explique peut-être que j’étais un peu plus tolérant à son égard…
IL DM
Excellent XD surtout que j’ai pas vu venir la chute :p
Shrykull
« As-tu ressenti un étrange sentiment quant au beige omniprésent ? Observe l’étrangeté de l’anime que tu regardes. Tu comprendra bien que tout ceci est irréel. On veut te soutirer des informations.
Oh, et Né…Amo, le yuri n’existe pas. »
(…)
« Insémination de l’idée : réussie. »
God, c’était bien fait.
Trit’
Purée, j’y ai CRU !!! O__O
Si j’avais pas lu jusqu’au bout, j’aurais EXIGÉ de voir ce type à la première occasion, tellement je suis à 101% d’accord avec lui sur certaines choses qu’il disait (oui, le yuri, évidemment… Mais pas que !) !!! Du coup, c’est un peu dommage qu’il y ait eu la chute (et le commentaire d’Axel)… é__è
Cet article est à marquer comme un des meilleurs que tu as pu poster sur « Néant Vert » !
Bravo et merci pour ce merveilleux moment de lecture ! J’applaudis des quatre mains ! * clap clap clap *
Sirius
Un dialogue vraiment très sympa. Revois juste la conjugaison du passé simple première personne. Sinon, ça sent le concurrent pour le prix originalité des awards =)
Hitohira fait partie de ces séries à thème qui n’ont pas l’ambition d’aborder sérieusement un loisir, tout juste de servir d’accroche. Mais c’est vrai qu’ils auraient pu construire un trip à la shojo-ai ça aurait été fun. Pis ouais, c’est beige.
Kamo kun
Excellent article! Probablement l’un des meilleurs que j’ai pu lire sur Neant Vert! Super Thriller semi-IRL!!! J’ai tripé, surtout à la chute façon chambre 1408!!! 🙂
Youé
Anime mis à part c’est cependant vrai que le théâtre est souvent présenté comme l’activité qui te permettra de vaincre ta timidité. Et tout les timides y ont un jour pensé, avant de se rendre compte qu’ils étaient trop timides pour oser s’inscrire. Après la vision de cet art dans l’anime me fait lourdement penser à la vision de la médecine qu’on voit dans la majorité des manga ou séries télévisées. Ah oui, ça ressemble à un vilain cancer, prenez du sirop !
Gen'
C’était… magnifique. J’arrive avec quinze jours de retard, mais je crois que c’est la première fois qu’un de tes billets me fait une telle impression. Je m’étais déjà rendu compte que tu avais une prose intéressante, sans jamais prendre le temps de commenter, mais là pour le coup, ton travail d’écriture relève plus de la nouvelle que du simple billet de blog, j’en reste bluffé. C’est drôle de constater qu’au sein d’un dialogue construit, les arguments en deviennent tout de suite plus justes et persuasifs, et tu nous mènes admirablement bien en bateau jusqu’au final, j’avoue que je n’ai absolument pas vu venir le coup de l’inception (manquait plus que Marion Cotillard). Tu joues avec tes lecteurs sans leur donner l’impression de faire une critique de la série, pendant que tu développes mine de rien ses différents aspects un à un.
Bref, je trouve l’exercice admirablement bien exécuté, bravo, c’est le genre de billet qui donne tout son sens à l’outil blog et à la liberté de propos qu’il nous offre. On ne trouvera jamais ce type de démarches dans un livre ou magazine, et je suis bien content qu’il existe des gens pour oser franchir le pas. J’en fais des tonnes, mais vraiment, l’idée était excellente. On pourrait sans doute tirer une leçon de tout ça (le tribadisme, c’est le bien ?).
Toro
Énorme :p
Sinon j’avais passé un plutôt bon moment devant Hitohira (enfin c’est ce dont je crois me souvenir, l’anime ne m’a pas vraiment marqué) mais c’est vrai aussi que c’était en 2007, comme l’Axel j’étais moins regardant à ce moment là (sans jeu de mot de mauvais goût).
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