2007, high as fuck
Vous le savez peut-être, ça va faire un an que je fais chaque nuit des rêves humides mettant en scène Jean-Luc Mélenchon. Ma copine n’en peut plus, mon entourage trouve ça gênant et les gens qui me suivent sur Twitter vont commencer peu à peu à craquer. Las, j’ai bien essayé de m’en sortir en lisant le programme de François Hollande ou en regardant Bayrou parler sur France 2 mais j’ai rechuté et j’ai fini par adhérer la semaine dernière au Parti de Gauche. Et je m’écoute des chansons bizarres en boucle.
J’ai du coup déjà assisté à une réunion de campagne entre militants dans une ambiance assez chaleureuse et amicale (même si il semble y avoir un running gag qui consiste à se moquer du PCF le plus possible) et ça m’a méchamment rappelé la campagne des présidentielles de 2007. Du coup, article personnel et subjectif sur mes souvenirs de cette période un peu haute en événements et couleurs.
Déjà en 2007 j’avais fraîchement 18 ans et j’étais donc en 1ere L pour ce qui est sans doute la meilleure année de ma scolarité. C’est cette année là que je cumule les casquettes de délégué de classe, de suppléant au président du Conseil de Vie Lycéenne (le conseil des étudiants japs à la française, c’est à dire bien moins mis en avant et bien moins charismatique), le Théâtre et une espèce d’aura qui fait que tous les professeurs sont incapables de m’en vouloir pour quoi que ce soit. Ca doit être le syndrome « 3 mecs dans une classe de 35 personnes, il faut les protéger. » Bref.
A l’époque je préparais avec 3 amis (qui étaient en ES trololo) un TPE sur le clivage gauche/droite, ce qui était en plus l’opportunité révée de sécher des cours pour aller rencontrer des responsables politiques ou assister à des meetings à la con. Au final j’ai eu 12 à ce TPE et aucune de ces rencontres n’a servi à quelque chose vu qu’on y allait juste pour le fun et le plaisir de poser des questions à des responsables politiques. Parmi ces trois amis, il y’avait LE meilleur pote de lycée, bien évidemment, qui avait redoublé sa seconde en ma compagnie et avec qui j’ai vécu une bromance tout à fait effective jusqu’a ce que Concombre Masqué vole mon coeur. Et si moi j’étais passionné de politique à l’époque, lui était un ultra fanboy. Et, surtout, était socialiste. Au point qu’il a encore aujourd’hui quelques responsabilités au sein des Jeunes Socialistes. Enfin bref.
Moi à cette époque, politiquement, je suis plutôt du côté PCF. Ma naïveté naturelle, sans doute, faisait que le programme de Buffet me semblait le meilleur et le plus humain de tous. Et puis à l’époque le concept de base du communisme me plaisait bien, l’égalité m’apparaissant un concept plutôt cool. C’était avant que je comprenne que le PCF était plus giga communiste. Reste que j’étais à l’époque relativement Buffetiste sans pour autant être ultra convaincu. Mais c’était surtout parce que le jour ou Royal a été choisie candidate socialiste, je me suis un peu offusqué parce que Fabius me semblait le mieux et SURTOUT parce que je savais au fond de moi que Royal se ferait laminer par Sarkozy et que seul Fabius avait alors une chance. Je comprendrais en mars dernier en regardant l’ignoble débat Fabius/Sarkozy que j’avais vraisemblablement tort à l’époque. Enfin.
Restait que j’aimais pas trop Royal, et que je détestais encore plus Sarkozy.
Holala Sarkozy en 2007 comment je pouvais pas le blairer. Mais enfin plus que tout il m’effrayait. C’est à dire que j’étais à l’âge ou justement la moindre annonce un peu alarmiste était susceptible de me toucher et de vraiment me mettre en stress. C’est surtout à partir du moment ou je l’ai vu déclarer dans Philosophies Magazine que la pédophilie était innée que là j’ai vraiment commencer à être en mode panique totale. Donc dans tous les cas la priorité était à « tout sauf lui. » J’étais même pas trop dans les préoccupations économiques et tout ça, je considérais juste que Sarkozy ferait un mauvais président, était totalement con et un peu dangereux. Bon on a pu constater aujourd’hui qu’il a été un mauvais président, qu’il est pas forcément très brillant mais qu’il est par contre totalement inoffensif au final. Ca va.
Dans tous les cas 2007 a été pour moi l’opportunité de découvrir une certaine façade du militantisme. Principalement via mon ami socialiste qui m’a vite fait découvrir les priorités du bon militant. Et les priorités du bon militant passent d’abord par l’affichage.
Si tu es militant, voilà ton ennemi.
Aussi incroyable que ça puisse paraître, et je l’ai encore constaté à la réunion du PdG, à l’heure de l’Internet et tout, il est encore considéré que l’affichage doit être une certaine priorité. Chaque militant se voit ainsi responsable d’un certain paté de maison, ou il doit vérifier le plus régulièrement possible que les affiches sont encore collées sur les panneaux autorisant l’affichage ainsi que sur les panneaux électoraux. Et le cas échéant, coller des affiches par dessus. C’est un sport national, qui ressemble un peu aux combats de tags de GTA San Andreas dans l’esprit. C’est dire que tel paté appartient à tel parti, une connerie comme ça.
Ca vire parfois tellement au serious business que lors des élections municipales de 2008, des militants du maire sortant -Modem- passeront une nuit entière cachés dans un bateau viking décoratif de rond-point pour prendre en flagrant délit des militants socialistes qui auront décidés de coller une affiche socialiste par dessus et essayer de leur défoncer la gueule. Ah ouais, on déconne pas avec les affiches du rond point, hein ! Je passe sur les crevages de pneus, les menaces physiques et compagnie. Il faut aussi comprendre que c’est surtout un truc qui se fait de nuit et que bien souvent le parti gagnant est celui qui passe le plus tard. Vu que les partis ont peu d’insomniaques dans leurs armées, c’est souvent des mecs totalements morts qui font ça et, voilà.
Il existe quelques autres règles tacites entre partis, du genre « on colle pas d’affiches sur les espaces non autorisés » (ce que le FN ne respecte historiquement jamais :’D), « on colle les affiches par dessus mais on ne décolle pas les affiches et on en fout pas partout par terre » (ce que le NPA ne respecte historiquement jamais :’D) ou « on ne s’amuse pas à décoller les affiches des panneaux électoraux » (parce que si vous le faites et que la police vous chope, amende et risque de prison, HUH.) Après libre aux partis de respecter ces règles, sachant qu’il n’y a pas vraiment de tendance « nationale », tout dépend du taux de crétinerie de ceux qui dirigent la section locale.
Mais dans tous les cas c’est sérieux. Perso je trouve ça désuet mais je sens que très vite je vais me retrouver à en coller sans poser de questions. C’est un peu un rite de passage, quelque chose pour vérifier si tu es prêt ou non à donner ton coeur au parti. Ok je questionne pas, j’espère juste que je pourrais représenter le parti aux présidentielles de 2052 parce que j’aurais pas refusé de faire du collage à une époque ou tout le monde s’en fiche :’p.
Ensuite il y’a les trucs habituels: le « boitage » (mettre des tracts dans des boîtes aux lettres), le « tractage » (distribuer des tracts sur un marché, une place) et autres organisations d’événements de qualité – et sur ce point le Front de Gauche est relativement original avec des distributions de jus de pomme, organisations de conférences sur des places publiques et autres trucs divers & variés mais je vais arrêter avant de faire trop ma pute partisane. Puis il y’a le porte à porte, une méthode qui fonctionne « bien » mais qui demande énormément d’efforts.
Dans tous les cas être un militant en campagne c’est quelque chose qui psychologiquement vous affecte beaucoup. Votre esprit devient omnibulé par votre candidat et toute la durée de la campagne peut avoir sur vous des effets assez inhabituels. Mon ami passait ainsi la majorité du temps, quand il était en voiture, à s’arrêter pour décrocher des affiches collées sur des espaces non autorisés voire à recoller des affiches à chaque panneau si il avait le matériel pour ça. On entre aussi dans une position de quasi idolatrie et tout contact avec des militants d’un autre parti, même du même côté politique que vous, devient très tendu. Imaginez que vous venez de passer la nuit à patrouiller en ville pour coller des affiches et que vous constatez que des militants de Whatever Party ont passés la nuit à vous suivre et à coller des affiches de leur candidat sur les affiches que vous avez fraîchement collées ? Pétage de plomb ! Et pourtant c’est monnaie courante ! Tout devient une gigantesque guerre froide ou on ne se gène plus pour faire des crasses à ses ennemis, souvent pour se venger de crasses qui étaient elles-mêmes des vengeances à une autre crasse qui elle-même… bref c’est un peu le foutoir.
Bref, devenir militant c’est entrer dans le petit monde des militants… un monde aussi incompréhensible pour le quidam moyen que n’importe quelle autre communauté un peu bizarre. J’y entre avec l’espoir de garder un peu les pieds sur Terre, j’essaie déjà de pas saouler mon entourage trop souvent avec Mélenchon, mais c’est pas facile !
Dans tous les cas 2007 ça s’est fini dans la tristesse. Le soir du premier tour j’étais un peu euphorique parce que j’avais mal calculé le report des voix (en oubliant Bayrou) et du coup j’étais convaincu que Sarkozy pouvait avoir maximum que 45% des voix. Sauf que bon, à la fin, Sarkozy a gagné, l’assemblée est restée de droite, les Guignols ont arrêtés définitivement d’être drôles, bad end.
Entre temps je me suis violemment desintéressé de la politique autour de 2008/2009. Ca a commencé fin 2007 avec une très très mauvaise expérience lors de la lutte contre la loi Pécresse d’autonomie des universités (j’étais opposé au bloquage du lycée, mais je me suis retrouvé à être co-organisateur du dit bloquage à cause de mes responsabilités au CVL, j’ai fini par péter un cable et ragequiter pour aller jouer à Guitar Hero III qui en plus était de la merde.) Peu après, j’ai lâché mon abonnement au Canard Enchaîné, j’ai continué à voter mais sans vraiment trop réfléchir ni obéir à une consigne de vote… j’ai voté PCF aux cantonales, PS aux municipales de ma bourgade de 9500 habitants, Europe Ecologie aux européennes après avoir hésité avec le Modem (!!) et je sais même plus quoi j’ai voté aux régionales, socialiste je crois… Mais début 2011 dernier j’ai commencé sérieusement à voir mon interêt capté par Mélenchon. J’avais déjà trouvé assez intéressant son départ du parti après les débacles du congrès de Reims (vous vous souvenez, quand Aubry a gagné le poste de premier secrétaire dans un chaos ahurissant qui a décrédibilisé tout le monde), et peu à peu hop j’ai commencé à le lire (son blog est cool), à l’écouter… et j’ai peu à peu adoré son caractère, ses propos, sa manière de pensée. Je suis bien conscient que son programme est peut-être un peu « naïf » mais j’en ai cure, je considère qu’il a tous les potentiels pour être un leader de qualité, franc, honnête et réfléchi.
Dans tous les cas, j’ai décidé de rejoindre le jeune Parti de Gauche pour soutenir un parti avec qui j’ai au final beaucoup de points communs idéologiques (mon seul vrai désaccord étant sans doute sur le nucléaire.) J’ai envie de l’aider et de m’y impliquer de manière plus ou moins profonde. Et peut-être en devenir quelqu’un avec des responsabilités, qui sait :3 ? J’ai toujours cherché à avoir des responsabilités politiques, ça pourrait être le bon levier, le bon chemin… Dans tous les cas comme je n’ai pas énormément confiance envers le PS et que je ne peux que constater la mort à petit feu du PCF depuis une décennie, le choix n’est pas non plus large. Et il est évident que je me méfie aussi de la NPA qui reste un parti d’extrême-gauche, souvent très alarmiste…
Dans tous les cas, rassurez-vous, j’ai bien l’intention de ne pas trop vous péter les couilles et les ovaires avec ça. Le blog ne deviendra pas une tribune régulière en faveur de Mélenchon et du PdG, vous pouvez vous en assurer.
En plus quand il était plus jeune, Mélenchon ressemblait beaucoup à mon méchant préféré de James Bond.
Voilà, j’ai arrêté de vous saouler pour de la politique. Mais c’est le moment de l’année ou je vais BEAUCOUP en parler. Alors comme ils disent dans cette série avec des jeux et des trônes, Brace Yourself.
2 commentaires
Ygg
Moi j’aime bien Mélenchon, je le trouve rigolo, il a exactement les mêmes mimiques et la même façon de parler que mon prof de français au lycée (qui était génial).
Sauf que lui c’était un fanboy du Figaro, il nous en refilait des articles à analyser 🙁
Il Palazzo-sama
« Tout devient une gigantesque guerre froide ou on ne se gène plus pour faire des crasses à ses ennemis, souvent pour se venger de crasses qui étaient elles-mêmes des vengeances à une autre crasse qui elle-même… bref c’est un peu le foutoir. »
Il est des noôtres, il a perdu son humanité comme les auôtres !
(même vécu pour ma part, alors que c’était dans un univers totalement différent, à savoir les élection universitaires)