[Le contre-article] Hai-Furi 01 – Les copains d’abord

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TFW un contributeur te devance pile avec l’épisode sur lequel tu planches.

Minorin-Avatar-MianCe sont les risques du métier. Il n’est jamais sorti autant d’animés par saison qu’à notre époque, mais il aura fallu que je choisisse le même que mon nouveau collègue. Et pour tout dire, le Badou a exprimé mieux que je n’aurais pu le faire la surprenante qualité de construction de ce qui n’était qu’à première vue une énième itération du combo “guns & girls”, au point d’intéresser un type pas du tout dans le délire comme moi.

Le fait est qu’à résultats similaires (il a aimé, j’ai aimé), nos approches ont été assez différentes et je trouve d’autant plus pertinent de compléter cette déjà bonne critique avec un point de vue alternatif que mon compère souligne un certain manque de contexte…  Contexte qui fait précisément l’objet de mon article. Alors, sans rancune, je vous mets devant le fait accompli et on repart pour une traversée.

Hai-Furi // Production IMS // Printemps 2016 // Prévu pour 12-13 épisodes // Réalisateur : Nobuta Yuu // Simulcast sur Wakanim

Deux articles à elle-seule, Misaki n’en revient pas.

Deux articles à elle-seule, Misaki n’en revient pas.

Il ne s’agit pas de répéter ce qui a déjà été dit. Badou résume bien l’épisode dans son article et j’en profite pour réduire l’exercice. En gros, l’animation nous apprend que la plus grande menace pour l’intégrité territoriale nippone n’est finalement pas la Chine, mais l’Océan Pacifique lui-même. Rassurez-vous, l’Atlantide n’est pas pour demain, mais le thème du “le Japon coule” est fortement ancré dans l’imaginaire collectif contemporain, entretenu au moins depuis un roman éponyme des années 1970. Que les auteurs de Hai-Furi y croient ou non, cela constitue un réservoir toujours prolifique pour la science-fiction, et un prétexte commode.

Ici, Hai-Furi prend le postulat que le Japon embrasse sa situation d’Etat -littéralement- maritime en réarmant toute la Kantai Collection et la fasse piloter -crise démographique oblige- par des lycéennes. Notre héroïne Misaki est l’une d’entre elles et cet épisode introduit les aventures et mésaventures de son premier jour de formation.

Faire trimer des bishôjo sur des navires de guerre? Bête argument commercial ou idée juste glauque, ce qui compte ici est que ce postulat est ici amené de façon à créer un divertissement très correct, assorti d’une série de petits détails, qui enrichissent la lecture de l’épisode.

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Notez l’ajout de radars modernes, en haut. Le goût du détail.

Parce qu’il faut le dire, je ne partais pas d’un bon a-priori. Je savais que ça sentait la poudre et la rouille, j’étais là pour voir jusqu’où ils iraient, mais le malaise, vous le sentez avec vos doigts, il est bien là. Deux écolières de primaire sont en train de se pâmer devant l’ex-fleuron de la Marine impériale, qui attend tous canons pointés, d’en redécoudre avec les Etats-Unis. Intéressant comme renflouer les épaves de la Deuxième Guerre mondiale est devenu une mode décomplexée.  Ceci étant dit,  le vieux Musashi  n’a pas repris du service pour conquérir l’Asie, mais pour une préoccupation très 2016: appliquer la loi sur les mers territoriales. Cette boussole que vous voyez à la proue, de même que les rayures colorées, qui reviennent tout au long de l’épisode sont le signe distinctif, non pas de la marine militaire, mais des garde-côtes (c’est un peu de l’overkill, quand même).

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Là où la tradition des animés aurait voulu une contextualisation péremptoire et barbante en voix off (“eeeen l’An de Grâce 2151, le Japon a été noyé par un cataclysme…”), Hai-Furi nous offre à VOIR ce qu’est devenu ce monde pendant que Misaki le sillonne à toute vitesse sur le jet-ski du swag. Tenez, juste ce panneau de signalisation: c’est un plan gratos? Regardez bien: Sarushima, une île donc, que vous pouvez maintenant rejoindre en prenant la première à gauche. A droite, Yokosuka n’est pas une ville bidon pour la série, mais le principal port militaire du Japon.

En somme, sans la moindre parole, on vient d’apprendre que 1) le pays a été inondé, 2) les Japonais ont refait avec un certain succès leur vie sur l’eau, 3) notre héroïne est une genki pure et badass, et 4) elle est sur le point de réaliser son rêve de gosse, et gare à quiconque se tient sur son chemin.

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Quelle optimisation du temps. Après des retrouvailles sans épanchements superflus, un discours juste suffisant pour apprendre que la directrice s’appelle Munetani et avoir un avant-goût des camarades à venir, Misaki jalouse sa Mary Sue de meilleure amie, laquelle a pas moins reçu que le commandement du gigantesque cuirassé vu en début d’épisode. En parallèle le futur rafiot de l’héroïne entre progressivement dans le champ de vision… pour mieux en souligner la relative insignifiance. C’est propre.

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Dreamteam. Rappel: ces gens ont des torpilles.

Temps de faire connaissance de tous les personnages importants à suivre, qui sont un bon exemple de comment faire la meilleure soupe avec les vieux pots. Commençons par Isoroku, matou gras avec une pure voix de bonhomme et amiral de la Marine impériale réincarné. Pas étonnant qu’il terrorise la rivale hautaine / future bro et plus si affinité (ou bien la japanime n’est pas stéréotypée et je suis archevêque), j’ai nommé Munetani (comme la directrice de l’école, quelle COÏNCIDENCE!). Terminons par le cast secondaire, incluant Mei, aka la fille-torpille, aka best-girl, et la navigatri-FUCKING HANAYO!! Dammit, le même caractère, la même voix de poule effarouchée. Il en faut pour tous les goûts. Et hop, les rôles et interactions sont posés!

Simple? Mais efficace. Et dans cette galerie de stéréotypes adorables et nunuches, l’héroïne bombardée capitaine de pédalo s’en sort honorablement, so far. Je suis le premier à râler que le MC soit nécessairement un cancre débile qui règle tout par la seule détermination et la volonté divine de l’auteur. Ce premier épisode réussit donc à ne me rendre personne foncièrement antipathique, ce qui est plutôt un succès.

Deux formes de beauté.

Deux formes de beauté.

Evidemment, la cible principale de Hai-Furi est là pour le military porn, alors donnons lui ce qu’elle veut. J’aime beaucoup qu’on puisse apprécier cet épisode à plusieurs niveaux. L’histoire de base reste compréhensible sans aucune explication supplémentaire, tandis que le passionné y trouve sa came sans parasiter en retour le casual avec un déluge d’exposition Wikipédia. A la place, c’est donc moi qui vous ai fait les recherches.

De ce que je comprends, le Harekaze de cette série serait le sister-ship imaginaire du Shimakaze (oui le même qu’avec la blonde au serre-tête lapin) un unique contre-torpilleur expérimental de la Deuxième Guerre mondiale. Ce qu’il faut apparemment retenir est qu’il va vite… quand il ne tombe pas en panne -dans l’animé au moins. A un navire qui n’a jamais existé, les auteurs se sont amusé à opposer un navire qui n’existe pas encore. Le seul navire moderne de l’épisode -et menace existentielle pour notre bande de bras cassés- est un trimaran ressemblant fort aux LCS Independence des Etats-Unis… dont le Japon discute de nos jours l’acquisition.

J’attends de voir en quoi consisteront concrètement les missions des “Blue Mermaids”, mais si l’on tient compte du soin à se distinguer d’une marine purement militaire, en dépit de l’anachronisme esthétique des navires et le postulat de science-fiction de Hai-Furi, son sujet semble en fait traduire -toutes proportions gardées- des considérations géopolitiques contemporaines, que je serai très curieux de voir développées par la suite.

* * *

Ceci était donc mon complément massif sur cet Hai-Furi qui ne paie pas de mine. Va t-on déchanter dès le deuxième épisode? J’espère bien que non, mais la vraie morale est qu’une petite production où l’idiotie de l’histoire le dispute au banal des personnages peut distraire son spectateur 24 minutes avec un bon rythme, l’inverse étant malheureusement aussi vrai.

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